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Heidi roule en Nissan

Mai 10, 2010

A l’étranger, lorsque l’on répond à l’inévitable question « De quel pays venez-vous? », se créé une certaine image prédéfinie dans l’esprit de l’interlocuteur, au moins pendant la première fraction de seconde. Par exemple, en répondant « La Suisse », je suscite régulièrement le rappel de stéréotypes comme les montres ou le chocolat. Il y a évidemment des variantes, et il est arrivé que la Suisse soit « Une île en scandinave », « un pays sans armée »(on me le dit souvent), « un pays où la lumière du soleil ne passe pas entre les montagnes » (en Afghanistan), ou même « le plus beau pays du monde »(au Pakistan).

Illustration du début du XXe siècle

Au Japon, presque à tous les coups, on vous dira « Le pays de Heidi!! » Et cela, parce le roman de Johanna Spyri a été adapté en 1974 (presque un siècle après avoir été écrit) en un dessin animé qui connu un succès tel que 36 ans plus tard non seulement personne ne l’a oublié, mais les jeunes générations aussi le connaisse! (Entre parenthèses, la série a été dirigée par Isao Takahata 高畑 勲, collaborateur de Hayao Miyazaki 宮崎 駿 aux studios Ghibli et qui a notamment produit Le tombeau des lucioles ou encore Mes voisins les Yamada).

La version du dessin animé de Takahata

Si je vous en parle, c’est parce que récemment Heidi a été engagée pour une série de pub pour Nissan. Je mets ici deux d’entre elles. Dans la première, Heidi réveille Peter pour lui demander ce que signifie « teïnenpi ». Elle répète plusieurs fois sa question mais il reste interloqué, puis s’écrie « rassemblement! » – (Heidi et Peter) »ouaiiis, allez on fait un rassemblement! »-(Peter) »Que les gens qui savent lèvent la main! » et il demande à ses chèvres. »Mêêêê » -« Aah bon.Ah bon.Ok, personne suivante! » -« Mêêê » -« Aha. » -(Heidi) »Bon alors c’est quoi teïnenpi?!? » -« Essayons le mâle là-bas! » Lequel aboie plus qu’il ne bêle, et Peter: « Ah. Aha. Ah oui je suis d’accord avec toi. » Puis la voix off fait: « Les chèvres, qui ne comprenaient pas les mots humains, et Peter qui n’est pas doué pour les études, tous n’avaient aucune idée de ce qu’était le teïnenpi.Mais en fin de compte, qu’est-ce donc que le teïnenpi? »

Dans d’autres épisodes, Heidi pose la même question à son grand-père, qui ne sait pas et que cela tracasse beaucoup. D’ailleurs je ne sais vraiment pas pourquoi, il ne parle pas en japonais standard, mais avec un très fort accent de Kyushu!! Finalement, il élucide le mystère de teïnenpi. Comme cela doit vous turlupiner, je vous le dit, ça signifie « basse consommation d’essence ». (Evidemment, c’est un anachronisme flagrant)

Grand-père est si content de savoir qu’il chante avec Heidi « teïnenpi, teïnenpi, teïnenpi-pi-piii!

L’image de la Suisse va-t-elle en être changée? Qui sait, dans quelques années on me rétorquera peut-être « le pays du teïnenpi! »

A.

A la place des apfelmakroni

septembre 17, 2009

Voilà, je peux dire que je suis installé.

Evidemment, les tout premiers jours n’étaient pas faciles. Mais en comparaison d’autres fois, la transition fut beaucoup plus fluide cette fois-ci. Je me souviens de l’année dernière, revenant au Japon après un an, posant mes valises chez un pote qui y habite, m’asseoir, souffler un grand coup et sentir mon moral tomber. La petite dépression post-adventum, un classique. Pendant l’Odyssée eurasiatique, je l’ai souvent ressentie. A fortiori lorsque non seulement la langue et la monnaie changeait, mais aussi le système d’écriture (par exemple, de Turquie en Iran, ou du Kirghizistan en Chine).

Il est vrai que j’en suis à mon troisième séjour dans l’archipel. Je savais ce qui me dérangerait, je savais ce qui me plairait. Sinon ma liste de « ré-impressions » du billet précédent aurait été dix fois plus longue! Et cela, loin de rendre fade le changement de pays, l’adoucit.

Car avoir un toit, un lit, une adresse, c’est une chose et non des moindre, mais cela crée aussi un sentiment d’enfermement. Que faire une fois que les affaires sont rangées, le corps rincé et l’estomac rassasié? L’extérieur est un grand espace hérmétique, opaque.

Il s’agit alors d’y enfoncer un coin et d’y ouvrir une brêche. Et cela ce fait petit à petit. Vaguer dans les alentours, se perdre deux ou trois fois, goûter une confiserie locale… Et puis trouver la piscine municipale, parler à un voisin, se perdre encore. Enfin, retourner sur les lieux du passé, mes premiers chez-moi à Tokyo, retrouver des vieilles connaissances, ou découvrir qu’on a perdu leur trace.

Grâce aux kami-sama, la nourriture au Japon est exquise (et bon marché). Je ne déroge pas à ma politique habituelle: manger local. En Suisse, profiter du chocolat, de la viande des Grisons, des fromages et surtout du pain! Mais jamais de sushis! Au Japon, me gaver de Sanuki udon, okonomiyaki, tofu frais et surtout de sashimi, et éviter absolument les restos européens.

Pas facile de se concocter un petit-déj suffisament calorique mais sain, mais j’ai la combine: Un grand bol de riz blanc, y ajouter deux boîtes de natto (graines de soja moisies qui deviennent gluantes quand on les touille, avec un goût de noisette), un oeuf cru, des algues(nori) en lamelles et un peu de sauce soya, et mélanger! Pour un repas qui tient au ventre, cela remplace avantageusement mes apfelmakronen (faire cuire dans du lait, au micro-onde, des tortelloni-ce qui en fait des apfeltortellonen!- fourrés aux épinards et ricotta de la Coopè, avec des morceaux de Golden. sortir avant que le lait bouille, couper de fines lamelles de gruyère mi-salé dessus et remettre 20 secondes.)

AG